En suite de la commission “DEVOIR DE SECOURS : MODALITÉS D’EXERCICE, FISCALITÉ, PRATIQUE DES JAF, ACTUALITÉ JURISPRUDENTIELLE, VOIES D’EXÉCUTION” s’étant tenue le 28 mars 2017 à la maison du Barreau de Paris, retrouvez un petit récapitulatif sur le devoir de secours.
Il peut être versé selon deux modalités :
- En forme monétaire via le versement d’une pension alimentaire.
- En nature :
- Prise en charge de passif du couple ou des dettes de l’époux créancier : si cela est à titre définitif, le juge doit le prévoir expressément, sinon cette prise en charge est réputée être à titre d’avance. Mais s’il y a des risques que l’époux débiteur ne paye pas, il vaut mieux s’en référer au paiement d’une pension classique car il n’existe pas de voie d’exécution spécifique en la matière.
- Attribution du domicile conjugal à titre gratuit (peu important la nature du bien, excepté un bien détenu par une SCI ou une résidence secondaire selon CA Poitiers 8 novembre 2006) : le juge conciliateur a alors l’obligation de déterminer le caractère gratuit de la jouissance (avant 2004, c’est la jouissance à titre onéreux qui était supposée à défaut). L’avantage qui correspond à la jouissance nature est imposable pour l’époux occupant et déductible pour l’autre époux (nécessaire d’évaluer la valeur locative du bien). Elle cesse normalement au prononcé définitif du divorce, sauf demande dérogatoire en présence d’enfants mineurs (article 313-2 alinéa 4 du Code civil).
- Versement de revenus d’un bien commun ou indivis (plus rarement car source de difficultés).
Tout comme la contribution aux charges du mariage qui impose aux époux de participer aux dépenses de la vie courante, le devoir de secours découle des devoirs entre époux. Il y a cependant des différences entre eux :
- Le devoir de secours ne s’adresse qu’à l’un des époux. Il n’est pas réciproque et simultané comme la contribution aux charges, laquelle est fonction des revenus de chacun. Cependant chacun des époux peut être amené à demander un devoir de secours selon sa situation.
- Lorsque le devoir de secours est fixé, il se substitue d’office à la contribution aux charges du mariage.
Quels sont les critères de fixation du montant du devoir de secours ?
- Le créancier doit être dans le besoin et les ressources réelles (même occultes) du débiteur doivent être suffisantes. La situation de concubinage est également prise en compte, mais non l’entraide familiale : le but est d’assurer une continuité dans les habitudes de vie du conjoint.
- Lieu et modalités de versement : la règle générale est édictée à l’article 1247 du Code civil, à savoir qu’il est versé au domicile de l’époux créancier sauf décision contraire du juge.
- Sa fixation est par définition provisoire et peut être modifiée en cas d’élément nouveau postérieur à l’ordonnance de non conciliation.
- Son indexation n’est pas automatique car elle n’est pas de droit. Il faut donc la demander selon l’article 202 alinéa 8 du code civil.
- Il prime sur les obligations alimentaires entre ascendants et descendants, et sur les procédures collectives.
- Les sommes versées au titre du devoir se secours restent définitivement acquises à l’époux créancier (revirement avec Cass. 1ère chambre civile, 30 juin 1998).
Il est exécutoire à compter de l’ordonnance de non conciliation car l’exécution provisoire est de droit (laquelle peut être suspendue devant le 1er président de la Cour d’appel selon l’article 524 du Code de procédure civile, via une assignation en référé) et susceptible d’exécution forcée à compter de sa signification (un seul impayé même partiel suffit).
Il est possible de faire appel de l’ordonnance de non conciliation ou de l’ordonnance du juge de la mise en état pendant 15 jours. Un déféré est aussi possible dans le second cas. Le pourvoi contre l’appel statuant sur l’ordonnance est recevable seulement s’il est formé en même temps que celui contre l’appel statuant sur le divorce.
Quelle est sa fiscalité ?
- Imposable au titre de l’impôt sur le revenu de l’époux créancier.
- Déductible pour l’époux débiteur.
Quelle est sa procédure ?
- Fixé dans le cas d’une procédure de :
- Divorce : généralement il est demandé en cas de divorce par contentement mutuel. Le juge peut alors le fixer dans une ordonnance d’ajournement par laquelle il fixe des mesures provisoires.
- Séparation de corps.
Le devoir de secours disparaît avec le prononcé du divorce devenu définitif c’est-à-dire quand le jugement passe en force de chose jugée (article 254 du Code civil : par exemple à l’expiration du délai d’appel, ou cas les parties acquiescent au jugement. A noter : le pourvoi et les appels généraux sont suspensifs, mais non ceux partiels limités aux conséquences du divorce, donc le devoir de secours perdure) mais aussi en cas de caducité des mesures provisoires (en raison de la réconciliation des époux à faire constater, le défaut d’introduction de l’instance dans les 30 mois du prononcé de l’ordonnance de non conciliation, on rebasculera alors vers la contribution aux charges du mariage) ou encore en cas de rejet définitif de la demande en divorce (article 258 du Code civil).
On peut aussi le retrouver en cas de décès du conjoint. L’époux survivant dans le besoin peut demander à la succession de lui verser une pension, laquelle est prélevée sur l’actif successoral. Le devoir de secours s’éteint ici alors uniquement avec le décès de l’époux créancier ou de la fin de son état de besoin.